Visite de l'Alhondiga à Bilbao

 

Philippe Starck a commencé le projet de la ville de Bilbao en 2005. Pour cela il se rapproprie un ancien entrepôt d'huile et de vin élaboré en 1909 par Ricardo Bastida, d'où son nom d'Alhondiga (« magasin » en Arabe).

Starck a totalement innové sur la structure du lieu tout en respectant le style moderniste de l'architecture. On entre maintenant par les anciennes fenêtres, en suivant une pente douce, création du designer qui y a élaboré un espace de verdure, rappelant le motif dominant du style moderniste, les végétaux, et qu'il a aussi développé sur les trottoirs. Ce projet du gouvernement basque, qui souhaitait créer un établissement culturel pour le 6eme arrondissement de Bilbao, a donc un prix: 75 millions d'euros.

Passé l'émerveillement de la façade, nous entrons dans un espace de 43000 m2 qui se divise en trois grands modules abritant la médiathèque, la salle de sport et un module encore en réalisation.

Le hall a été aménagé dans l'esprit d'une place médiévale où chacun peut se rencontrer et vaquer à des occupations diverses, de la restauration à la connaissance en passant par le bien être et le sport. On y trouve un espace vitré qui abrite les bureaux et les restaurants, un écran géant qui laisse une place dominante au soleil, symbole de l'Alhondiga. Viennent ensuite les trois grandes structures de briques reposant sur des colonnes, uniques dans leur composition et leur esthétique.


Un mot clef : la différence

- Dans l'architecture :

La diversité des matériaux est vraiment un élément prédominant dans les choix de Philippe Starck. L'Alhondiga est une rencontre entre la brique, le béton, la pierre, l'acier. Mais aussi de matériaux plus rares comme le marbre avec certaines colonnes sur lesquelles reposent les différents modules.

Chacune des 43 colonnes imaginées par Starck sont différentes, il a joué avec les divers mouvements artistiques, moments historiques et avec plusieurs matériaux.

Dans son esprit chaque matière devait définir des lieux particuliers. Ainsi la salle d'exposition est elle surmontée d'un espace vitré.

- Dans les secteurs d'activité :

Les activités de l'Alhondiga son très diverses, à l'image de cet esprit de place médiévale. On y trouve deux restaurants, un cinéma de 7 salles, une médiathèque, une salle d'exposition, un auditorium et un complexe sportif avec piscine.

 

Le sous-sol

Pièce majeure de cet espace, l'auditorium accueille de grandes manifestations, comme le festival littéraire. Il abrite 400 places, sans compter les espaces dédiés aux handicapés. Son design est très moderne et l'on est tout de suite attiré par le magnifique encadrement de la scène, qui est représentée comme un tableau.

A l’étage inférieur se trouve une salle d'exposition de 1200m2 avec un mobilier entièrement dessiné par Philippe Starck.

Dans ce sous-sol nous sommes impressionnés par le design, les jeux de lumière et la grande visibilité des informations via l'informatique.

Le travail d'architecture et de décoration sont à la fois épurés et très recherchés, en témoigne la salle Bastide qui révèle un effet d'optique des plus originaux : l'impression d'instabilité de la pièce, de murs mobiles, de par leur revêtement en pierre.


La Médiathèque

Le projet de médiathèque est né d'un projet de la ville, d'un besoin du 6ème arrondissement qui en était alors dépourvu. Il s'agissait de fournir un service et d'élargir l'offre documentaire, en orientant celle-ci principalement sur les activités du centre à savoir les loisirs, le bien être, tout comme l'action socioculturelle et le multimédia. Plusieurs projets furent proposés et la médiathèque fut mise en service le 24 octobre 2010.

D’une superficie de 4000 m2 répartie sur 3 étages, elle est ouverte tous les jours de l'année et sur une amplitude horaire très large, de 10h à 22h en semaine et de 11h à 21H les weekends et jours fériés.

Elle offre plus de 250 postes de lecture, une salle d'étude, des postes informatiques, un accès d'une heure à internet (afin de ne pas concurrencer les services privés donnant accès à ce même service) et un espace MediaLab.

L'espace se caractérise par la polyvalence. On peut remodeler chaque étage, seuls les espaces de travail en groupe et le secteur jeunesse (Txikiland) sont réellement délimités et isolés. Cet espace ouvert permet aux usagers de s'approprier la médiathèque, de l'utiliser de manière confortable, conviviale et indépendante. Tout est fait pour la mobilité, notamment le mobilier à roulette, et pour la simplicité avec les délimitations d'espace, les gommettes qui indiquent le genre ou la langue des ouvrages.

Chaque étage dispose d'un point d'information, de postes dédiés à la consultation libre d'internet et du catalogue, mais aussi de bornes automatiques de prêts et de réservations.

 

La collection est réellement interdisciplinaire, à l'image de ce complexe socioculturel. Dans un souci d'adéquation aux activités de l'Alondhiga les 50 000 documents du fonds se concentrent surtout sur le cinéma et la littérature, les activités de bien-être et de loisirs, la vulgarisation scientifique et l'auto-apprentissage.

Les collections sont classées selon les grands centres d'intérêts qui se retrouvent par des codes couleurs sur les côtes, des pictogrammes de genre en littérature et des gommettes pour la différenciation des langues.

La médiathèque a donc une multitude d'activités et de services. Nous avons déjà évoqué les points d'informations, la consultation en salle, le prêt automatique. A cela s'ajoutent d'autres offres comme la consultation de journaux internationaux, la réservation informatisée, un service de reproduction de documents, des espaces de travail en groupe, la suggestion bibliographique, la formation et certaines activités plus originales comme les visites guidées, la mise à disposition de télévisions proposant des chaînes internationales ou encore des ateliers ludiques et éducatifs. La médiathèque compte aussi développer le prêt entre bibliothèques, les services virtuels et le prêt de livres électroniques. D'autre part la médiathèque organise des conférences et des expositions comme celle organisée en partenariat avec Angoulême sur la Bande Dessinée.

Tous ces services et activités sont gratuits, en adéquation avec la politique de gratuité mise en place dans tout l’établissement.

Tout cela est rendu possible par une gestion particulière.

La médiathèque est parrainée par la BBK - Bilbao Bizkaia Kutxa/Caja de Ahorros de Bilbao y Vizcaya (l'équivalent de la Caisse d'Epargne en France)- par un accord de cinq ans, qui garantit un financement de deux millions d'euros par année à la médiathèque.

Elle combine donc une gestion propre et une gestion externe. Seules trois personnes sont directement employées par la ville, le reste du personnel est engagé par sous-traitance, grâce à un appel d'offre géré par une entreprise privée, qui emploie plus de 22 personnes pour les services aux utilisateurs et deux pour les processus techniques.

L'Alhondiga elle même est une société privée, bien que les parts de cette société appartiennent à la Mairie qui en a donc le contrôle.

La médiathèque fait partie du réseau de bibliothèques de la ville de Bilbao et a de ce fait les mêmes outils de gestion, le même catalogue, la même politique de prêt, mais une autonomie complète dans les acquisitions, la gestion et la planification des services.

Elle est aussi en complète adéquation avec le lieu qui l’abrite et a un accord de coopération avec les autres services de l'Alhondiga. De ce fait les différents pôles travaillent mutuellement sur de nombreux points, lorsqu'il s'agit par exemple d'élaborer une bibliographie pour une exposition spécifique.

Enfin la médiathèque coopère avec d'autres institutions comme la FGSR (FUNDACIÓN GERMÁN SÁNCHEZ RUIPÉREZ) ou la Cité internationale de la BD et de l'image d'Angoulême.

Quelques données peuvent rendre compte du succès de cette institution :

  • l’Alhondiga a reçu dès le premier jour environ 5000 visiteurs et depuis l'ouverture 388 865 personnes ont fréquenté l'institution ;
  • plus de 184 521 prêts ont été effectués, soit environ 900 prêts par jour. Ceux-ci ont été faits automatiquement pour environ 80%, notamment à cause de problèmes avec les bornes automatiques qui ont rendu nécessaires les prêts manuels.


Cette visite fut donc très instructive, tant sur les possibilités qui sont aujourd'hui offertes aux bibliothèques en termes de développement, qu’en termes d’offres numériques et de collaboration entre institutions.

L'Alhondiga est un modèle de coopération entre la ville, les sociétés privées et d'autres institutions internationales. Mais elle représente surtout un modèle de diversité en mêlant notamment design, restauration, culture écrite, cinéma et bien-être.

C'est un lieu innovant, magnifique voire grandiose où tout semble possible tant dans les activités que dans l'organisation de l'espace. On s'y sent libre, indépendant, sans pour autant être perdu dans l'espace et les informations. L'accueil qui nous a été fait fut d'ailleurs très chaleureux, ce qui laisse présager, ou en tout cas espérer, des liens plus étroits avec cette institution et d'autres merveilleuses visites.

                                                                                               A. N.                                                                                            


Le site : http://www.alhondigabilbao.com/

Visite en images  : ici