Loi n° 2021-1717 du 21 décembre 2021 relative aux bibliothèques et au développement de la lecture publique
Cette loi concerne, sauf le dernier article, les seules bibliothèques relevant des collectivités territoriales. Elle est novatrice : rien de ce qu’elle contient n’était auparavant dans la loi. Le principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales (article 72 de la Constitution) s’exerçant dans le cadre de la loi, celles-ci sont donc libres de définir ou mettre en œuvre des politiques publiques relatives aux bibliothèques, mais désormais dans le cadre institué par cette loi. C’est une loi d’incitation plutôt que d’obligation, d’où l’absence de décret mis en chantier après son adoption, ce qui n’empêchera pas de proposer des décrets ou modifications de décrets existants sur tel ou tel point ni qu‘une jurisprudence apparaisse à la suite de recours relatifs à sa non application. Tous les articles modifient le Code du patrimoine (CP), sauf deux qui modifient le Code général des collectivités territoriales (CGCT) et un le Code général de la propriété des personnes publiques (CG3P). Selon les cas, dans le dialogue avec la hiérarchie administrative et politique, il peut être intéressant de citer soit la loi Robert, soit les articles de ces codes qui en sont issus.
Chapitre I : Définir les bibliothèques et leurs principes fondamentaux
Les bibliothèques des collectivités territoriales ou de leurs groupements ont pour missions de garantir l'égal accès de tous à la culture, à l'information, à l'éducation, à la recherche, aux savoirs et aux loisirs ainsi que de favoriser le développement de la lecture.
La loi définit en termes généraux les bibliothèques des collectivités territoriales par l'énonciation de leurs missions. Elles sont générales, ne concernent pas seulement les collections et ne renvoient pas exclusivement à ce qui se passe dans les locaux. Introduit par le verbe garantir qui crée une obligation, l’égal accès est à entendre au sens large : égalité territoriale, sociale, culturelle ou relative à divers handicaps, de manière à ce qu’aucune personne ne soit lésée. Ce à quoi les bibliothèques donnent accès porte sur un spectre large :
« culture » : champ dans lequel on range traditionnellement les bibliothèques. Ce n’est pas seulement de la culture descendante mais peut être compris comme « accès à la culture comme œuvres et pratiques » (voir plus bas sur les droits culturels au 2° du présent article) ;
« information » : cette notion légitime notamment le rôle des bibliothèques dans l’éducation aux médias et à l’information (EMI) mais aussi l’accès à des périodiques sur papier ou en ligne ;
« recherche » : cette notion peut s’entendre largement, du collégien à l’enseignement supérieur en passant par la recherche amateur ;
« savoirs » : l’usage du pluriel ne renvoie pas uniquement à un savoir descendant mais inclut aussi l’idée de participation, de savoirs des usagers ;
« loisirs » : les bibliothèques sont aussi légitimement des services permettant de la détente, du divertissement ;
« développement de la lecture » : la lecture étant une condition de la maîtrise du langage, et donc de l'exercice de la citoyenneté et de l'inclusion dans la société, les bibliothèques favorisent son apprentissage et son exercice, tous langages confondus (texte, image et son) tout en entretenant le goût.
Cet article peut servir de référence à tout projet d’ensemble défini par l’autorité territoriale ou proposé par les professionnels, par exemple un projet culturel, scientifique, éducatif et social (PCSES), mais aussi pour toute opération ponctuelle ou sectorielle. On peut s’appuyer notamment sur l’énumération « culture, information, éducation, recherche, savoirs, loisirs » pour proposer des projets mais aussi répondre aux objections d’élus, de la hiérarchie, de membres de la population ou de collègues sur le thème « Ce n’est pas à la bibliothèque de... »
À ce titre, elles : "1° Constituent, conservent et communiquent des collections de documents et d'objets, définies à l'article 4, sous forme physique ou numérique ;"
La collection est le premier moyen cité pour remplir les missions. L’introduction du mot «objet» constitue une véritable ouverture (œuvres d’art ou leur reproduction, instruments de musique, jeux et jouets, matériel informatique, matériel de lecture, outils de bricolage, etc.)
Cet article justifie l'évolution et la diversification possible de ce qui est consultable et empruntable, allant bien au-delà des collections "classiques" livres, CD, DVD" vers toutes sortes d’objets et matériels sans avoir à se poser la question des limites de ce qui relève des bibliothèques ou médiathèques mais plutôt de ce qui est utile et en relation avec les missions énoncées au début de l’article 1.
"2° Conçoivent et mettent en œuvre des services, des activités et des outils associés à leurs missions ou à leurs collections. Elles en facilitent l'accès aux personnes en situation de handicap. Elles contribuent à la réduction de l'illettrisme et de l'illectronisme. Par leur action de médiation, elles garantissent la participation et la diversification des publics et l'exercice de leurs droits culturels ;"
Les « services, activités et outils » dépassent la notion de collection et donnent une grande latitude d’interprétation et d’évolution. L’accessibilité concerne tous les types de handicap et les services sur place comme à distance. À la lutte contre l'illettrisme, classique mais toujours d’actualité, est ajoutée celle contre l’illectronisme, générateur de nouvelles modalités d’exclusion. La médiation entre ici dans la loi, associée à la diversification des publics et à leur participation. Les droits culturels, qui s’inscrivent dans le cadre juridique des droits de l’homme, visent à faire reconnaître le droit de chaque personne à participer à la vie culturelle, de vivre et d’exprimer sa culture et ses références, dans le respect des autres droits humains fondamentaux. Elle figure déjà dans la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (NoTRE) du 7 août 2015 à l’article 103 et la loi relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine (LCAP) du 7 juillet 2016 à l’article 3 (voir références sur les droits culturels en note ci-dessous). Tous ces principes peuvent être mis en œuvre de façon différente selon la taille et l’organisation (en réseau ou non) des bibliothèques.
Ces modalités d’action peuvent inspirer des projets ainsi légitimés par la loi. Ce 2° légitime tout moyen innovant de mettre en œuvre les missions définies à la première phrase de l’article 1.
"3° Participent à la diffusion et à la promotion du patrimoine linguistique ;"
Cet alinéa peut être rapproché de la liste des langues régionales publiée par le ministère de la Culture . Toutefois, le terme “régional n’étant pas mentionné, on peut en faire une lecture plus large intégrant les autres langues parlées par des populations d’origine étrangère. L'approche par le “patrimoine” ne doit pas empêcher d'aborder ces langues comme pratique vivante.
Selon la situation locale, justifier par cette loi l’acquisition de documents dans d’autres langues que le français et parlées localement, voire l’usage de ces langues dans des activités et des supports d’information. On peut étendre la démarche à des méthodes d’apprentissage de ces langues ou du français à partir de ces langues.
"4° Coopèrent avec les organismes culturels, éducatifs et sociaux et les établissements pénitentiaires."
Cet alinéa légitime des partenariats classiques mais parfois contestés. Il est dommage que les établissements du secteur médico-social n’aient pas été explicitement mentionnés mais on peut les ranger derrière l’expression « organismes sociaux ».
Selon la situation locale, justifier par cette loi des partenariats avec des organismes et établissements tiers entrant dans les champs énoncés en y intégrant les établissements de santé comme les EHPAD et les hôpitaux. Y faire référence dans les conventions passées avec ces différents organismes.
"Les bibliothèques transmettent également aux générations futures le patrimoine qu'elles conservent. A ce titre, elles contribuent aux progrès de la connaissance et de la recherche ainsi qu'à leur diffusion."
Au-delà des fonds patrimoniaux stricto sensu que conserve un certain nombre de bibliothèques, la notion de patrimoine peut être étendue : au-delà du patrimoine statique, hérité, on peut parler de patrimoine vivant, en constitution, constitutif notamment d’une mémoire locale et s’interroger sur la part que peut prendre la bibliothèque dans sa constitution, sa préservation, sa transmission, sa mise en valeur et son utilisation. La contribution à la recherche peut concerner toute personne utilisant à cette fin les ressources d’une bibliothèque mais aussi son personnel lui-même, en écho à cette mission figurant dans le décret n°2020-195 du 4 mars 2020 sur la BnF : « elle conduit des programmes de recherche en relation avec le patrimoine dont elle a la charge, particulièrement sur la bibliothéconomie ».
Selon le contexte local, proposer des actions relatives au patrimoine au sens large et l’intégrer dans la politique documentaire et justifier des travaux de recherche menés par le personnel lui-même voire leur participation à des actions de formation ou aux activités des associations professionnelles.
"Ces missions s'exercent dans le respect des principes de pluralisme des courants d'idées et d'opinions, d'égalité d'accès au service public et de mutabilité et de neutralité du service public."
Le pluralisme qui est développé plus bas à propos des collections est ici rattaché à l’ensemble des missions. Sa portée est donc plus large et porte aussi par exemple sur l’action culturelle. La loi consacre la bibliothèque comme service public : elle n’est pas un club qui a des adhérents, elle est au service des populations. La doctrine française du service public repose traditionnellement sur trois principes : égalité, continuité et mutabilité (c’est-à-dire évolutivité) dont deux sont ici explicitement mentionnés. L’égalité est notamment celle de l’accès, mentionnée dès la première phrase de la loi. La mutabilité commande de s’adapter à l’évolution des usages et des pratiques. La neutralité concerne généralement dans le service public l’égal traitement de tous les usagers et l’interdiction pour le personnel d’afficher une appartenance d’idée ou de croyance. Dans le cas des bibliothèques, elle est en outre liée à la notion de pluralisme. Elle ne renvoie donc pas à la fadeur mais à la multiplicité des goûts.
Rappeler l’obligation de pluralisme au cas où des commandes pourraient y porter atteinte. Rappeler en cas de besoin que la bibliothèque est un service public avec les obligations qui s’imposent, dont la neutralité. S’appuyer sur le principe de mutabilité pour procéder aux évolutions nécessaires.
L'accès aux bibliothèques municipales et intercommunales est libre.
Le libre accès aux bibliothèques est inconditionnel. Il ne doit pas être conditionné à l’inscription ni au lieu d’habitation par exemple. Cette disposition ne peut faire obstacle à des mesures temporaires qu’elles soient locales (par exemple en application du règlement intérieur) ou générale (par exemple dans le cas de mesures d'exception touchant un ensemble d'établissements dont les bibliothèques).
Cet article rend illégal le fait de conditionner de façon permanente l’entrée dans les locaux d’une bibliothèque.
L'accès aux bibliothèques municipales et intercommunales et la consultation sur place de leurs collections sont gratuits.
La gratuité garantie par la loi concerne l’accès aux locaux et la consultation sur place. La tarification relève de la libre administration des collectivités territoriales. L’ABF défend la gratuité totale de l’inscription qui n’est conditionnée ni par le statut ni par l’âge ni par le domicile des personnes.
On peut s’appuyer sur les articles 2 et 3 pour défendre l’idée de gratuité générale de l’inscription même si les tarifications sont légales. La gratuité générale n’est limitée ni selon l’âge, ni selon les moyens d’existence, ni selon le lieu du domicile.
Les collections des bibliothèques des collectivités territoriales ou de leurs groupements sont constituées de livres et des autres documents et objets nécessaires à l'accomplissement de leurs missions, tels que des documents sonores et audiovisuels.
Cet article prend acte de la diversification de ce que les bibliothèques mettent à la disposition du public et peut être interprété largement dès l’instant que cela répond aux missions énumérées dans la première phrase de l’article 1. Voir aussi sur les collections le 1°) de l’article 1.
Justifier toute extension de ce qui est mis à disposition sur place et/ou prêté en le rapportant aux missions générales des bibliothèques.
Les collections des bibliothèques des collectivités territoriales ou de leurs groupements sont pluralistes et diversifiées. Elles représentent, chacune à son niveau ou dans sa spécialité, la multiplicité des connaissances, des courants d'idées et d'opinions et des productions éditoriales. Elles doivent être exemptes de toutes formes de censure idéologique, politique ou religieuse ou de pressions commerciales. Elles sont rendues accessibles à tout public, sur place ou à distance.
Cet article fondamental fait remonter au niveau législatif une notion « d’équilibre des fonds » qui ne figurait, sous cette formulation beaucoup plus succincte, que dans le décret sur le contrôle scientifique et technique à propos des critères à la disposition des inspecteurs généraux. Il s’impose aux élus et à la hiérarchie administrative comme aux bibliothécaires. Le pluralisme prend la forme d’un devoir de « représentation » qui dépasse les demandes explicites du public. Il ne concerne pas seulement les idées notamment politiques ou religieuses mais aussi « la production éditoriale ». Le pluralisme est aussi culturel : ouverture aux genres et tendances présentes dans les productions éditoriales. On peut considérer que cela concerne tous les supports y compris les périodiques. Ce devoir de représentation est tempéré par deux critères : la spécialisation éventuelle d’une bibliothèque et son « niveau », c’est-à-dire sa taille. Cela tempère la notion traditionnelle d’encyclopédisme des collections. La censure mais aussi son envers l’imposition de titre, non explicitement mentionné, peut venir de la hiérarchie administrative ou politique, d’usagers, de groupes de pression et de bibliothécaires.
Cet article pose les principes qui doivent guider la conception d’une politique documentaire, évoquée à l’article suivant. Il peut être utilisé en cas de pressions d’où qu’elles viennent mettant en cause le pluralisme ou tendant à une censure. En cas de besoin, prendre conseil auprès de collègues, de l’ABF (groupe régional comité d’éthique), de la bibliothèque départementale, du conseiller Livre et lecture de la Drac ou en dernier recours contacter le Collège Bibliothèques documentation, livre et lecture publique de l’Inspection générale de l’éducation du sport et de la recherche (IGÉSR). Les recours juridiques sont: le recours amiable auprès de l’autorité territoriale, qui fait courir le délai de recours, puis le tribunal administratif. En cas de situation grave et manifestement illégale l’article 40 du Code de procédure pénale prévoit la saisie du Procureur de la République sans passer par la voie hiérarchique.
Les collections des bibliothèques des collectivités territoriales ou de leurs groupements qui relèvent du domaine privé mobilier de la personne publique propriétaire sont régulièrement renouvelées et actualisées.
Le « domaine privé mobilier » désigne ici, selon le Code général de la propriété des personnes publiques, les collections non patrimoniales des bibliothèques. Le devoir d’actualisation se réfère au contenu informatif mais aussi à la production culturelle. Le devoir d’actualisation et de renouvellement implique la légitimité du désherbage et la nécessité d’un budget.
Le devoir d’actualisation et de renouvellement légitime le désherbage parfois incompris par la collectivité, dans le public ou par la presse locale, mais aussi la nécessité d’un budget d'acquisition suffisant pour assurer un renouvellement, que la Bibliothèque publique d’information, qui fait référence dans ce domaine, fixe à 10 % par an de la collection en libre accès.
Les bibliothèques des collectivités territoriales ou de leurs groupements élaborent les orientations générales de leur politique documentaire, qu'elles présentent devant l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement et qu'elles actualisent régulièrement. Elles présentent également leurs partenariats avec les organismes culturels, éducatifs et sociaux, les établissements pénitentiaires et les établissements d'accueil de la petite enfance. La présentation peut être suivie d'un vote de l'organe délibérant.
La politique documentaire relève clairement de la bibliothèque, donc de son personnel ainsi que le manifeste l’usage du possessif « leur politique documentaire ». Mais c’est une politique publique dont il est normal qu’elle soit portée à la connaissance du public dans ses grands principes. Cela passe par la présentation des « orientations générales » devant l’assemblée délibérante (conseil municipal, communautaire ou départemental selon les cas). Il ne s’agit en aucun cas de la liste des titres commandés, les agents de la bibliothèque effectuant librement les choix d’acquisition et d’élimination dans le cadre des « orientations générales ». Le vote sur ces orientations est possible mais pas obligatoire. Il offre cependant une légitimité opposable aux usagers. La loi oblige une telle présentation à intervalles « réguliers » non précisés. Dans la liste des partenariats possibles, qui dépendent du contexte local, manquent, comme au 4° de l’article 1, les établissements de santé. Dans la pratique aucune sanction n’est prévue mais c’est une incitation à la formalisation et à la déclaration de la politique documentaire. La validation politique d’une charte des collections, notion équivalente à celle d’orientations générales de la politique documentaire énoncée ici, était déjà recommandée par l’ABF dans son document La politique d’acquisition en 12 points datant des années 1990 et développée dans le Memento du bibliothécaire dès sa première édition en 2010.
Si ce n’est pas fait, s’engager dans une formalisation de la politique documentaire à commencer par un texte d’orientation générale puis des outils plus précis facilitant sa mise en œuvre. Présenter le document d’orientation à l’assemblée délibérante. Cela passe naturellement par la voie hiérarchique et peut entraîner en amont un dialogue avec la hiérarchie administrative et politique. On peut conseiller une présentation au début de chaque mandat, éventuellement suivi d’une présentation à mi-mandat. La présentation des partenariats peut être plus fréquente en fonction de leur évolution. Si la hiérarchie le permet, être présent à la séance de l’assemblée et pouvoir répondre aux questions.
Les agents travaillant dans les bibliothèques des collectivités territoriales ou de leurs groupements présentent des qualifications professionnelles nécessaires à l'exercice des missions définies à l'article L. 310-1 A [du CP, c’est-à-dire à l’article 1 de la loi Robert].
Cet article pose un principe général, les statuts particuliers des cadres d’emplois territoriaux relevant de décrets. Le terme « qualification » implique une reconnaissance formelle par diplôme ou concours ce qui ne serait pas le cas du terme « compétences ».
À chaque risque de décision de recrutement sans tenir compte des qualifications, montrer cet article. Ce principe général peut être utilisé en cas de négation par une collectivité de la nécessité de la qualification professionnelle.
Chapitre II : Soutenir le développement de la lecture publique
[A propos des bibliothèques départementales] Les départements ne peuvent ni les supprimer, ni cesser de les entretenir ou de les faire fonctionner.
La disparition de la bibliothèque départementale des Yvelines et la fermeture de fait de celle de Mayotte ont montré que jusqu’ici c’était légalement possible. Cela ne le sera plus même si l’interdiction de cesser d’entretenir n’empêche pas formellement de réduire les moyens. Cet article, qui ne peut avoir d’effet rétroactif, rend formellement obligatoire une compétence des départements qui ne reposait jusqu’ici que par la mention, dans le Code du patrimoine, du transfert des bibliothèques centrales de prêt qui est intervenu le 1er janvier 1986. Il institue une obligation de structure (une « bibliothèque ») à l’appui de l’obligation d’objectifs énoncée à l’article suivant.*La confirmation du caractère obligatoire de cette compétence intervient à la suite de la loi NoTRE du 7 août 2015 qui a privé les départements de leur clause de compétence générale : ils n’exercent plus que des compétences obligatoires.
À chaque risque de décision visant à supprimer formellement ou faute de moyens une bibliothèque départementale, utiliser cet article. Chaque fois qu’un département énonce ses compétences dans un document de travail interne ou un document public, veiller à ce que cette compétence obligatoire soit rappelée. La mentionner dans les conventions avec la DRAC et autres partenaires
Les bibliothèques départementales ont pour missions, à l'échelle du département : « 1° De renforcer la couverture territoriale en bibliothèques, afin d'offrir un égal accès de tous à la culture, à l'information, à l'éducation, à la recherche, aux savoirs et aux loisirs ; « 2° De favoriser la mise en réseau des bibliothèques des collectivités territoriales ou de leurs groupements ; « 3° De proposer des collections et des services aux bibliothèques des collectivités territoriales ou de leurs groupements et, le cas échéant, directement au public ; « 4° De contribuer à la formation des agents et des collaborateurs occasionnels des bibliothèques des collectivités territoriales ou de leurs groupements ; « 5° D'élaborer un schéma de développement de la lecture publique, approuvé par l'assemblée départementale. »
Jusqu’ici la seule mention des missions des bibliothèques départementales figurait dans les circulaires ministérielles successives sur les bibliothèques centrales de prêt entre 1945 et 1984. Cette définition des missions s’impose aux départements sans les empêcher de définir leur propre politique. Elle conforte la légitimité des bibliothèques départementales auprès des exécutifs départementaux. Les deux premiers items portent sur le rôle d’accompagnement et d’expertise. La mission de fourniture des collections ne vient qu’en troisième lieu associé aux « services », Les notions de « couverture territoriale » et de « mise en réseau des bibliothèques » entrent désormais dans la loi. La mission de formation est consacrée et s’étend aux collaborateurs occasionnels, expression juridique désignant ici les bénévoles exerçant dans des bibliothèques rurales. On peut considérer que l’appellation « schéma de développement de la lecture publique » n’est pas à prendre au mot et que des documents appelés « plan de développement de la lecture publique » ou autrement peuvent en tenir lieu. Son obligation conduit les départements à formuler une politique assortie d’objectifs, ce que beaucoup ont déjà fait.
À chaque risque de décision visant à supprimer formellement ou faute de moyens une bibliothèque départementale, montrer cet article. Proposer un schéma de développement ou la mise à jour périodique d’un tel schéma s’il existe. Faire référence à tout ou partie de cet article pour toute proposition d’activité de la bibliothèque départementale.
Dans l’article sur le concours particulier de la DGD, les « établissements publics de coopération intercommunale » sont remplacés par les mots « groupements de collectivités territoriales » ; Au début du deuxième alinéa, le mot : « Toutefois, » est supprimé.
Ouverture à davantage de types de groupement que les seuls établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) mais en restant strictement dans le cadre des groupements de collectivités énumérés à l'article L5111-1 du Code général des collectivités territoriales : pôles métropolitains, pôles d'équilibre territoriaux et ruraux, agences départementales, institutions ou organismes interdépartementaux et ententes interrégionales. La ministre de la culture a indiqué que des reversements de collectivités territoriales aux établissements publics de coopération culturelle (EPCC) et aux groupements d’intérêt public (GIP ) seront rendus possibles par décret.
Lorsqu'un établissement public de coopération intercommunale décide que la lecture publique est d'intérêt intercommunal, il élabore et met en place un schéma de développement de la lecture publique. [Cette disposition] entre en vigueur le 1er janvier 2023.
À partir du 1er janvier 2023, cet article fait entrer explicitement la « lecture publique » dans le Code général des collectivités territoriales (CGCT), principal document de référence pour les collectivités. Il indique qu’il peut y avoir une compétence « lecture publique » alors que n’était présente dans le CGCT que la compétence de gestion d’équipements culturels, sans autre précision. Il ne la définit pas ; ce qui permet une large interprétation (transfert ou gestion de bibliothèques, mise en réseau, coopération culturelle, mission de coordination, etc.). Cet article sans effet rétroactif n’institue pas une compétence « lecture publique », le mot "compétence" ne figurant pas dans le texte. Il prescrit, si une compétence relative à la lecture publique est prise sous une forme ou sous une autre à compter du 1er janvier 2023, d'élaborer un schéma de développement, c’est-à-dire une politique communautaire de lecture publique s’inscrivant dans la durée. Les réseaux de bibliothèques sans lien institutionnel avec un EPCI ne sont pas concernés par cet article.
La coopération intercommunale en matière de lecture publique n’est pas un bloc figé et peut correspondre à un large éventail de formules dont le transfert à l’EPCI de tout ou partie des bibliothèques n’est qu’une option éventuelle. Si l’EPCI organise, sans l’avoir formalisée dans une prise de compétence, une coopération sous une forme ou sous une autre dans le domaine de la lecture publique (mise en réseau informatique, mission de coordination, coopération en matière d’action culturelle ; etc.), l’inciter à l’exprimer, telle qu’elle est mise en œuvre, dans une compétence mentionnant explicitement la « lecture publique ». À partir du moment où une compétence a été officialisée par le conseil communautaire concernant les « bibliothèques » ou « médiathèques » ou « la lecture publique », proposer si ce n’a pas été fait d’élaborer un schéma de développement. Pour les EPCI qui formuleraient à compter du 1er janvier 2023 une compétence relative à la lecture publique, proposer quelles qu’en soient les modalités de la formuler en utilisant l’expression « lecture publique d’intérêt intercommunal », montrer qu’un schéma est prescrit et faire des propositions pour l’élaborer.
Les documents appartenant aux bibliothèques de l’État, de ses établissements publics, des collectivités territoriales et de leurs groupements ne relevant pas de l'article L. 2112-1 [= relevant du domaine privé mobilier et non du domaine public mobilier dont relèvent les fonds patrimoniaux] et dont ces bibliothèques n'ont plus l'usage peuvent être cédés à titre gratuit à des fondations, à des associations relevant de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association mentionnées au a du 1 de l'article 238 bis du code général des impôts et dont les ressources sont affectées à des œuvres d'assistance ou à des organisations mentionnées au II de l'article 1er de la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire . Par dérogation aux articles L. 3212-2 et L. 3212-3 [qui prohibent la revente des dons de l’État et des collectivités territoriales] du présent code, ces documents peuvent être cédés à titre onéreux par ces fondations, associations et organisations. »
Le Code général de la propriété des personnes publiques (CG3P) permet à l’État, aux collectivités territoriales et à leurs établissements publics de vendre leurs biens meubles du domaine privé, (dont les documents non patrimoniaux des bibliothèques), mais pas de les donner. Cet article légalise une pratique existante de don à des organismes qui peuvent redonner ou revendre. Cela concerne des associations, des fondations et des entreprises d’économie solidaire. L’exception de don n’est pas étendue aux collectivités ni aux particuliers. À noter que cet article est le seul de cette loi à concerner aussi les bibliothèques de l’enseignement supérieur public, la BnF et la Bpi, relevant toutes d’établissements publics de l’Etat. Cette loi ne change rien à la possibilité de vendre, par exemple lors de braderies, le produit du désherbage puisque le CG3P permettait la vente des biens meubles du domaine privé.
Montrer à sa hiérarchie cet article pour faciliter le désherbage en donnant à des associations, fondations ou entreprises d’économie solidaire. Pour céder à une autre collectivité (bibliothèque publique, bibliothèque scolaire, CDI, PMI,etc), pratiquer le dépôt par convention ou le prêt. On peut aussi invoquer la jurisprudence évoquée dans le Guide pratique du CG3P p. 132 (référence citée par Claudine Liebert et Françoise Gaudet p. 122 de leur ouvrage Désherber en bibliothèque, Cercle de la librairie, 2013) qui admet le don, entre collectivités « lorsque cette cession est justifiée par des motifs d’intérêt général ». La mise à disposition des particuliers au public des produits du désherbage dans des bacs à l'entrée de la médiathèque ou dans des boîtes à livres demeure non prévue par la loi.